samedi 26 octobre 2013

KAAAAAAAAAARRIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIISSSS

Rappeur de Sevran, barbu, baraqué et noir. Kaaris est un phénomène lyrical et un excellent exemple de l’adrénaline musique. Etiqueté  « Gangsta RAP » pour ses lyrics crus et ses beats sombres, Kaaris n’est pas du tout un rappeur gangsta.

Michel Bampély, chroniqueur pour le Nouvel Obs a écrit que le Gangsta Rap parlait de « violence policière, de racisme et de drogue », j’ose penser que sa liste n’était pas exhaustive et qu’il est conscient que le Gangsta Rap c’est surtout «des meurtres futiles, des gangs, un milieu misogyne et homophobe » dans lequel les plus défavorisés vivaient et donc décrivaient. (http://leplus.nouvelobs.com/contribution/959497-kaaris-premier-sur-itunes-pourquoi-il-ne-peut-malgre-tout-pas-detroner-booba.html)
Gangsta Moderne ou Adrénaline music
"J'suis dans le fond du club, thug, viens nous, viens nous faire un hug" rappe Kaaris dans Ciroc un des sons de son album  « Or Noir », 1er sur Itunes. Kaaris c’est un flow saccadé décadent parfois hors tempo, une voix grave soutenue à outrance, des paroles brutes qui s'affranchissent des carcans classiques de la langue française. Un tout inadéquat pour du soit disant mal nommé "Gangsta Rap".
« La soirée ne fait qu's'embraser, tu veux déjà me quitter
Enfoiré tu viens pas m'embrasser, tu veux déjà me niquer »
(Ciroc)
Lorsqu’on écoute du Gangsta Rap, "Colors" de Ice T ou "Real Muthaphuckking G’s" d'Eazy E, on ressent un mal être et une fierté, une souffrance, une violence inextricable enracinée dans le quotidien du rappeur. C’est ainsi que je décrirai le gangsta rap des années 80. De plus, les instrus de l’époque installaient le trouble dans nos oreilles. Que le beat soit violent comme Straight outta Compton (NWA) ou lent comme Today was a Good day (Ice Cube), le style West Coast y était gravé.
Puis le Gangsta Rap a connu sa phase New Yorkaise puis Sudiste bref tout le monde peut aller sur google pour trouver les origines du Gangsta Rap. Tout cela pour dire qu’aujourd’hui on est dans une phase de Gangsta Moderne ce que j’appelle de l’Adrénaline Music. Sur un beat Trap/dévrivé Dirty Douth/ sauce Chopped and Screwed, les rappeurs nous offrent des métaphores grotesques, hyperboles hypertrophiées, et des comparaisons surréalistes. Au-delà de boire ces vers comme paroles d’évangile, on bouge sur le beat et lorsque l’adrénaline nous prend, on rappe ces mots que seuls eux comprennent.
Un univers sans Kaarisme
Paul Pogba ou encore Nicolas Anelka tous fans de la clé de bras de Kaaris.

 La recette que Kaaris est propre. Une instru trap donc, un refrain répétitif et simple à chanter, des gimmicks innovants et des punchlines coléreuses. La forme est reine dans le royaume du "Binks". Le fond apparait quelque fois en featuring sur quelques morceaux. En effet, sur ses 18 titres Kaaris a privilégié l’adrénaline. Des sons qui te donnent envie de faire de la musculation ou qui te font croire que lors d’une castagne trois contre un, tu as peut-être ta chance. Kaaris ressort en nous notre instinct primaire. Il y a clairement quelque chose de bestial dans son monde. Le talent de Kaaris se situe là, cette capacité à te faire devenir quelqu’un d’autre quand tu l’écoutes au premier ou au second degré. En écoutant Kaaris, on entre dans un univers muni de codes parfois difficile à cerner, des expressions ivoiro-sevranaises que seuls les initiés peuvent déceler et surtout on engrange de la détermination.
Kaaris n’a pas le charisme de Youssoupha. Epitomé de la street, on imagine mal Kaaris en feat avec Vitaa. C’est le mec « vrai » par excellence en tout cas pour l’instant. Celui qui a la bouche salement remplie de lyrics acérés, burlesques ou hardcores c’est selon. Pour comprendre la personne derrière le personnage il faut écouter ses morceaux plus personnels. « Paradis ou Enfer », « Plus rien » ou encore « Or Noir » nous laissent une sensation différente. Le MC ivoirien se révèle par à coup :
Moi j'n'ai jamais écouté l'prof, moi, j'n'ai jamais fait mes devoirs
Mama, et si la police me coffre, c'est que t'as eu un bébé noir
Et j'ai juré d'être hardcore, jusqu'à ma mort. (Or Noir)
En mode "je m’en bas les c*****"
Kaaris c’est aussi ça. Le "je m’en foutisme absolu". Sur des sujets politiques ou sociaux, il ne se dit pas décrire un paysage social donné. Il évoque juste ce que les gens qu’il côtoie vivent ici ou ailleurs. Ne comptez pas sur lui pour représenter une cause ou pour vous expliquer quelque chose « Je n’aime pas les gens qui rappent et qui m’expliquent des trucs, je préfère le lire ou regarder BFM». Capable d’écrire un texte sérieux, il n’hésite pourtant pas d’insérer quelques verbes acerbes pour pimenter le tout. « Quand je pars sur un truc conscient comme sur Paradis ou enfer ou bien Or noir, je peux m’amuser, c’est facile parce qu’il y a la métaphore, la figure de style… »
(Paradis ou Enfer)

Il évoque dans "Paradis ou Enfer" la guerre et la situation de son pays natal (Côte d’Ivoire). Le message de Kaaris n’est pas l’apologie de la violence mais plutôt les méandres ou conséquences de celle-ci. Le fameux cercle vicieux de la paupérisation sociale. Son message est agressif dans la forme et au fond il est conforme aux maux d’une jeunesse qui n’a jamais goûté aux mots doux. Hardcore, cauteleux, sanguin, il se veut produit de son milieu.  « Malhonnête mais pieux », il décrit ses tribulations, ses erreurs, ses sacrifices, le paradoxe de vivre dans la foi en tant que pêcheur. Non, Kaaris n’exhorte pas vos enfants à mettre leur gros doigt de pied dans le vagin de leur copine. Au contraire, il nous donne une image primaire de l’homme donc de ce qu'il ne faut pas faire selon la bienséance. Une image je dis bien une image...
Ton cadavre derrière quelques plots
Le sang est plus épais que l'eau
Armés comme à l'époque du Clos
Les singes viennent de sortir du zoo
(Zoo)

Cet album de Kaaris est une réussite dans le genre Adrénaline Music. On y trouve aussi des balades Hardcore et quelques sons consciencieux. Protégé de Booba ou pas, le rappeur certifié Or Noir est l’une des surprises du paysage urbain de cette année. De Kalash à ZOO, en faisant « Clic clic » à tout bout de champs, Kaaris a les mots pour électro-choquer une jeunesse en manque d’énergie.

Oooooooooorrrrhhhhh !

Sources:
Nouvel Obs "Kaaris, premier sur iTunes : pourquoi il ne peut malgré tout pas détrôner Booba"

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